Lis mes ratures...

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La vie d'Adèle, Abdellatif Kechiche

J’ai entendu parler de la scène de sexe très crue, très longue. De la tyrannie du réalisateur, surtout pendant ladite scène. Un gros vilain. Et puis c’est tout. Un film de trois heures, réduit aux sept minutes que dure la scène de sexe très crue et pas si longue, en fait, au regard de la durée totale.

 

Et puis, pas si crue non plus, en vrai, mais plutôt honnête, à l’image du reste. Adèle mange elle s’en met partout, Adèle pleure elle a de la morve au nez, Adèle fait l’amour et on voit son sexe.  Normal, inévitable, vu l’angle de la caméra. Comme lorsque le jeune homme avec qui elle couche, se mettant sur elle, livre à l’objectif un aperçu fugace de son pénis. Logique, tout simplement.

 

Si j’ai été gênée, choquée, offusquée ? Non. Ce qui me choque parfois, en revanche, c’est le manque de réalisme des scènes charnelles au cinéma. Quand l’homme sort du lit déjà caché par son caleçon et que la femme s’endort toute propre toute nette. Voir un couple faire l’amour ne me pose aucun problème. Le grand écart entre le cinéma tout public, avec ses scènes de sexe si écourtées et symboliques qu’elles ne servent à rien (dans ce cas, je trouve l’ellipse plus efficace), et le porno, avec ses ahanements poussifs et son immanquable éjaculation faciale, me chagrine. La vie d’Adèle a le mérite de poser la question de la représentation du sexe à l’écran. Et, si le choc des corps tient une si grande place dans ce film, c’est parce qu’il cimente le couple Adèle-Emma. À bien y réfléchir, la sexualité est importante dans la vie de beaucoup d’entre nous. Faut pas se mentir.

 

(Et les plus drôles sont à mon avis ces Messieurs qui s’insurgent de la crudité du film et reluquent en douce des films X, bref.)

 

Je parle de la position qui est la mienne : celle d'une jeune femme hétérosexuelle n'ayant jamais couché avec une autre fille. Aussi, quand je parle de réalisme, je parle de non dissimulation, d'une caméra qui, posée, saisit les choses telles qu'elles se déroulent face à son objectif, sans chercher à les montrer plus, sans chercher à les planquer. Pour ce qui est du réalisme des pratiques, honnêtement, je n'en sais rien, je ne me prononce pas, je n'ai pas les "compétences" pour le faire : mon savoir dans le domaines des amours lesbiennes se limite à une question un jour posée par ma grand-mère, "Mais... ils font l'amour comment, les homosexuels, ils se frottent ?"

Autrement dit, beaucoup de clichés et de stéréotypes qui ne supporteraient pas l'épreuve de la réalité, je pense. Aussi, je préfère me taire :)

 

J’ai aimé que le film prenne son temps. La façon dont le passage des années est suggéré à travers le physique des personnages (coupes de cheveux, coiffures, façon de s’habiller). Le parti pris d’éluder les questions relatives à l’homosexualité (l’annonce aux parents, la réaction des amis…) : au fond, l’orientation sexuelle d’Adèle ne change pas grand-chose. La justesse des dialogues, parfois casse-gueule pourtant (je pense aux discussions entre lycéennes, propices à la caricature). La représentation des corps (un peu moins la caméra très près du visage, fatigante au bout de trois heures).

 

Le personnage d’Emma m’a semblé un peu plus stéréotypé : l’étudiante des Beaux-arts, l’artiste aux cheveux bleus… Moins convaincue.

 

Adèle Exarchopoulos est superbe.

 

Je n’ai pas regardé ma montre une seule fois. Et j’ai été émue.

 

J’ai aimé.



16/01/2014
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